Les sports où le nombre de femmes licenciées dépassent celui des hommes sont rares. Le roller et le skateboard en font partie. En effet, la Fédération Française de Roller & Skateboard (FFRS) dénombre 54 % de femmes parmi ses licenciés. « Nous avons plusieurs disciplines qui ont toujours été mixtes par nature », relève Hervé Lallement, directeur technique national. Parmi les onze disciplines chapeautées par la FFRS, la majorité est reliée au roller : artistique, course, roller derby, roller hockey, roller freestyle, avec roller soccer et trottinette, randonnée et rink hockey. Le skateboard et le skateboard descente complètent la liste. La FFRS agit afin de favoriser la mixité également au haut niveau. « Il n’y pas de différence lors des stages fédéraux. Cela a toujours été comme ça », explique le DTN. « Il y a un programme unique en équipe de France, femmes et hommes disposent du même staff, des mêmes entraîneurs. »
Gracias « Soy Luna »
Il n’existe cependant pas de plan fédéral pour féminiser ces disciplines. « Nous nous appuyons sur les ligues départementales pour qu’elles développent des stages, indique Hervé Lallement. Elles connaissent le terrain et sont capables de réagir pour intéresser les jeunes filles. » Le DTN avance également une autre explication. « On remarque que les clubs s’implantent dans des petites villes ou des villages où il y a moins d’équipements sportifs. » Si les statistiques globales entre hommes et femmes ont toujours été équilibrées à la FFRS, la proportion de femmes est passée de 48 à 54 % il y a deux ans, grâce à un coup de pouce venu d’Amérique latine. « Avec la diffusion de la série argentine Soy Luna (l’histoire d’une jeune fille qui s’épanouit dans son adolescence grâce au roller, NDLR), nous avons eu une vague d’inscriptions de jeunes filles », explique Hervé Lallement. Honorine Barrault, qui s’est distinguée aux derniers championnats du monde juniors au Pays-Bas en juillet 2018 où elle n’est jamais descendue au-dessous de la 6e place sur les 10 épreuves, puis aux Jeux olympiques de la Jeunesse en octobre dernier grâce à une médaille d’argent, fait partie de celles qui ont entendu l’appel du roller. « Je distribuais des flyers pour faire découvrir le roller et j’ai voulu moi-même essayer. Ça m’a tout de suite plu, se souvient-elle. Je me suis inscrite dans le club de Bouguenais, en Loire-Atlantique, où je suis restée 10 ans, avant de partir m’entraîner au Pôle France à Nantes. » Autre exemple, Shani Bru, qui a préféré la planche aux patins à roulettes. « À 13 ans, je fréquentais un groupe de garçons qui allaient souvent au skate park de Bergerac et j’ai décidé de faire comme eux. » Issue d’une famille de sportifs, l’envie d’entrer en compétition la démangeait. Celle qui est maintenant en études de STAPS à Bordeaux a donc pris sa licence pour entrer dans un club de Périgueux.
« Découvrir les JO »
Ces sports, qui savent attirer aussi bien les filles que les garçons, cherchent leur place aux Jeux olympiques. Le skateboard a pris de l’avance et fera ses grands débuts aux JO de Tokyo, en 2020, grâce à deux épreuves : la rampe, passer plusieurs variétés de courbes, et le street, terminer un parcours qui ressemble à une rue. « Vingt athlètes peuvent espérer se qualifier », relève Hervé Lallement. Chez les femmes, Shani Bru, 20 ans, vice-championne d’Europe en mai 2018, fait partie des espoirs de qualification française. Celle qui a participé aux derniers Championnats du monde en Chine et qui occupe une place dans le top 20 sur le tour professionnel, pourrait avoir l’occasion de découvrir l’ambiance des JO. « La perspective des Jeux olympiques me motive, sourit-elle. Je m’entraîne déjà beaucoup, ça ne va donc pas beaucoup me changer. J’ai envie de découvrir l’événement mais, pour le moment, je me concentre sur ce que j’ai à faire. » « Les meilleurs riders français veulent tous y aller », affirme Hervé Lallement. Des stages d’entraînements et de récupération seront organisés. Cependant, « chacun a ses conditions d’entraînement personnelles, estime Shani Bru. Les stages c’est plus pour le plaisir de se retrouver. Je veux y arriver par moi-même. » La campagne de qualifications a commencé en janvier pour s’achever en mai 2020. Les athlètes auront à cœur de briller pour leur pays, mais également pour leur sport. « L’enjeu est que le skateboard reste une discipline olympique », insiste Hervé Lallement. Pour le DTN, Los Angeles 2028, au pays où est née cette discipline, est « un de nos meilleurs atouts. » « Nous espérons aussi que le CIO restera dans sa ligne de conduite de chercher un public jeune. Je ne pense pas que le skateboard sera un one shot, mais il ne faudra pas se rater lors des JO de Tokyo. » Chaque passionné et licencié du skateboard peut agir à son échelle. Shani Bru transmet une belle image de son sport en relayant ses résultats sur les réseaux sociaux.
Les chiffres clés du roller et du skateboard
« Monter les marches les unes après les autres »
Et le roller dans tout ça ? Pas d’entrée aux JO tokyoïtes, mais une candidature a été déposée pour la prochaine édition. Hervé Lallement n’est cependant pas optimiste et ne s’attend pas à voir le roller de vitesse parmi les cinq sports additionnels aux Jeux de Paris en 2024. « C’est un enjeu de la Fédération internationale qui débat avec le CIO », rappelle-t-il. Pour le DTN français, il faut d’abord « monter les marches les unes après les autres » ce qui implique, dans un premier temps, de consolider la présence du skateboard. Le roller aux JO ce n’est donc pas pour tout de suite. Cependant, Honorine Barrault a déjà goûté aux saveurs d’un podium olympique. C’était en octobre dernier lors des Jeux olympiques de la Jeunesse à Buenos Aires, en Argentine. La jeune fille de 17 ans se rappelle sa joie au moment de rafler l’argent sur l’épreuve combinée. Quand on lui demande ses impressions sur ces JOJ, elle répond « très grands ! ». « Tout était regroupé », raconte-t-elle. « J’ai pu parler avec des jeunes de différentes nationalités et disciplines et aller voir d’autres sports comme le basket 3x3, le saut à la perche, l’aviron, l’escrime et la boxe. Tout était grand et fait pour nous. » En deuxième année juniors, son objectif à court terme est la compétition en seniors et se maintenir au niveau, « mais la première année on prend une claque », prévient-elle. Cependant, les Jeux olympiques seniors restent dans un coin de sa tête. « J’espère connaître les JO en France. J’y pense, je suis encore jeune. » Même s’il ne figure pas (encore ?) au programme olympique, ce sport a son grand rendez-vous : les World Roller Games, qui regroupent toutes les épreuves de toutes les disciplines. La prochaine et deuxième édition se déroulera en juillet 2019 et devrait réunir 3 000 à 4 000 athlètes. « Ceux sont nos Jeux olympiques », explique Hervé Lallement. « C’était un pari de la Fédération internationale afin de montrer notre capacité aux partenaires et aux médias d’organiser une telle compétition, de franchir une marche internationale. » En 2017, à Nankin, en Chine, la France avait obtenu 24 médailles, dont 11 en or. Combien en 2019, avant de, pourquoi pas, rejoindre les autres sports à la grande fête des Jeux olympiques ?