Le 30 septembre dernier, l'AccorHotels Arena de Paris explosait au moment de l'annonce des résultats du concours au sol de gymnastique. Avec 13,750 points, Mélanie De Jesus Dos Santos apportait sa troisième médaille d'or à la délégation française lors des Internationaux de Paris. Et écrasait ses concurrentes : sept dixièmes d'avance sur la Canadienne Eslabeth Black notamment. Logique, alors que la Martiniquaise de 18 ans, championne d'Europe au sol à Glasgow (Écosse), est ce qui se fait de mieux actuellement sur le Vieux Continent. La gymnaste, née le 5 mars 2000 sur la terre de sa mère à Schœlcher, est en train de tout emmener sur son passage. Alors que ses débuts, du petit club local de la Gauloise de Trinité jusqu'au Pôle France de Saint-Étienne (Loire), n'auguraient pas forcément d'un tel raz-de-marée.
Sa médaille d’or au sol cette année reste le plus beau titre de sa carrière (© PA Images / Icon Sport)
Intégration du Pôle France à 12 ans
Enfiler ses chaussons de gymnaste pour la première fois est arrivé grâce à un coup du destin, un destin qui ne tient parfois qu'à un fil. « La gym, je l'ai un peu connue par hasard. J'en faisais déjà chez moi quand j'étais toute petite, se souvient la gymnaste. Un jour, je suis allée avec mes parents dans une salle pour essayer et m’inscrire, mais on m'a dit qu'il n'y avait plus de place disponible. Du coup, j'ai pratiqué le judo durant une journée et, dès le lendemain, on m'a appelée pour me dire qu'il y avait une place qui venait de se libérer ! Comme quoi, ça se joue sur peu de choses. Et, depuis mes 5 ans, je n'ai plus jamais lâché ». Un signe du destin pour celle qui a été élevée par une mère athlète, alors que son père faisait du foot en loisir. « J'ai commencé à vraiment pratiquer à la Gauloise, avant de participer à des stages de la Fédération nationale ». Des stages où elle est repérée. En 2012, à douze ans, elle intègre le Pôle France de Saint-Étienne. Pas la plus simple des périodes pour celle qui ne retournait en Martinique qu'une fois par semestre, alors que sa mère ne la rejoignait en métropole qu'une fois par an. « Je connaissais déjà un peu la métropole, mais ce déménagement a quand même été dur les six premiers mois... Je suis venue seule, sans ma famille. Puis on s'y habitue ».
« Je suis plutôt complète »
Ce qui est drôle pour Mélanie, également sociétaire du Kréyol Fort-de-France et qui s'entraîne 26 heures par semaine, c'est que ses débuts n'ont pas fait l'unanimité. « Les premières années, je ne sortais pas vraiment du lot par rapport aux autres filles. Je n'étais pas très coordonnée, j'étais un peu à la ramasse, pour être honnête... C'est vraiment quand j'ai intégré le Pôle que ça a commencé à aller de mieux en mieux, que j'ai commencé à me démarquer ». C'est aussi grâce au travail qu'elle effectue depuis cinq ans avec ses deux entraîneurs, Éric et Monique Hagard. Le premier s'occupe des barres asymétriques, du saut et du sol, alors que la seconde s'arrête sur la poutre et la chorégraphie. « Je suis plutôt complète, mais mon point faible, je le sais, c'est que je ne suis vraiment pas patiente, concède Mélanie, consciente de son caractère parfois débordant. Je m'énerve vite. Et je sais que ça peut être chiant (sic) pour mon entourage au quotidien. D'un point de vue plus technique, et au niveau des agrès, ce sont les barres où j'ai le plus de mal ». Malgré ses petits défauts à corriger, la jeune Française survole sa discipline, et se mêle aux toutes meilleures gymnastes internationales : six médailles en Coupe du monde, dont deux en or, et trois médailles aux Championnats d'Europe. Dont un dernier coup d'éclat, le 5 août dernier à Glasgow, où elle remporte le tout premier titre continental français depuis Isabelle Sévérino, en 2005.
Après son rendez-vous manqué en 2016, elle vise plus que jamais les JO de Tokyo 2020 (© Schreyer / Icon Sport)
Évacuer pour mieux rebondir
« Celui-là, ça a été le plus beau, forcément, s'extasie celle qui a également quatre titres aux Championnats de France. Déjà parce que c'est le plus prestigieux que j'ai décroché, mais aussi parce que je ne pensais jamais pouvoir terminer première. Je me débrouille bien au sol, mais au point de remporter le Championnat d'Europe... Mon objectif, c'était de finir troisième, je ne pensais pas pouvoir faire plus. Et puis, cette médaille d'or est arrivée ». Une belle revanche pour elle, qui s'est rompu les ligaments croisés d'un genou après une réception en saut durant l'été 2015. Une grave blessure qui l'avait éloignée des compétitions pendant neuf mois, et l'avait privée des qualifications pour les Jeux olympiques de Rio. « Quand c’est arrivé, j'ai tout de suite pensé que c'était mort pour les JO, que je n'aurais jamais la possibilité de reprendre à temps. Et, finalement si, j'avais repris plus vite que prévu. Or, l'équipe de France était déjà complète, je ne pouvais pas arriver comme ça et tout bousculer. Mais ça n'a pas été si dur que ça psychologiquement, parce que j'avais eu le temps de m'y préparer ». Mélanie De Jesus Dos Santos, c'est un physique, mais aussi et surtout un mental d'acier, qui la mènera peut-être sur le toit du monde et sa quête d’une qualification aux Jeux de Tokyo 2020, ses prochains objectifs. Les seules marches que n'a pas encore franchies ce petit bout de femme, qui devrait encore faire vibrer la France de la gymnastique quelques années...
La bio express de Mélanie De Jesus Dos Santos
Paris 2024, si son corps le lui permet
« Les Jeux olympiques, c'est le rêve de tout sportif de haut niveau, donc c'est forcément le mien. Mais je ne sais pas encore si je pourrai y prendre part, parce qu'en gymnastique, à 24 ans, tu es déjà vieille ! (Rires) Même s'il y a une Ouzbèke là, Oksana Chusovitina, qui fait encore du saut à 40 ans (Chusovitina pratique toujours alors qu'elle est âgée de 43 ans, NDLR) ... Mais c'est rare. Même s'il y a des gymnastes comme elle, je ne sais pas vraiment à quel niveau de forme je serai à ce moment-là. Mais c'est sûr que ça donne envie, surtout que ce sera à la maison. Tout est possible ».
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