La vie de Lucas a basculé alors qu'il n'était âgé que de 3 ans. « Un matin, à son réveil, il a été victime d'un AVC, confie Marie Mazur, sa mère. Ce qui a entraîné une malformation à la cheville dont nous ne connaissons pas la cause ». Ce handicap ne l'empêchera pas de pratiquer le sport. À 6 ans, il commence par le football, à Pinsaguel, dans la banlieue de Toulouse. Un peu plus tard, alors que sa famille habite Colomiers, il s'essaie au rugby. C'est au collège, grâce à l'UNSS (Union nationale du sport scolaire), que le jeune garçon découvre le badminton. « Au départ, il était un simple joueur de niveau départemental, se souvient sa maman. Son jeu n'avait rien d'extraordinaire ». Son entraîneur, Benoit Larcher, lui apprend qu'il peut pratiquer cette discipline en tant que joueur handicapé. Nous sommes en 2013 et les championnats du monde de parabadminton approchent à grands pas. Alors âgé de 16 ans, Lucas se rend à Dortmund pour y participer. Sans réel entraînement, il se fait éliminer en huitièmes de finale.
Des titres en pagaille
Cette même année, le parabadminton est pris en charge par la Fédération française de badminton. « C'est l'une des premières décisions que j'ai prises lorsque j'ai été nommé directeur technique national, explique Philippe Limouzin. J'aime la très haute performance partagée par tous et je souhaitais que le badminton touche tous les publics ». Désormais aidé par la fédération, aussi bien pour ses déplacements que pour la formation de son staff, le jeune badiste tricolore intensifie ses entraînements. Et ses efforts sont rapidement récompensés. En septembre 2014, il remporte les championnats d’Europe à Murcie (Espagne) en simple et décroche une médaille de bronze en double. L'année suivante, il confirme lors des championnats du monde, à Stroke (Angleterre), en devenant vice-champion du monde en simple. En 2016, le Salbrisien réalise le triplé (simple, double, double mixte) à l'occasion des championnats d'Europe à Beek (Pays-Bas), asseyant davantage sa domination dans la catégorie SL4 (classe correspondant aux joueurs uniquement affectés d'un handicap d'un membre inférieur, NDLR). À la fin de cette année, il est élu joueur handisport international 2016 lors d'une cérémonie organisée à Dubaï.
Sur le toit du monde
Le 26 novembre 2017, Lucas franchit un nouveau palier en s'adjugeant son premier titre de champion du monde, à Ulsan (Corée du Sud). En finale, il s'impose en deux sets face à l’Indien Tarun Tarun, qui l'avait battu au même stade de la compétition deux ans plus tôt. « Cette fois, j’ai réussi à tourner le match à mon avantage, réagit-il après la rencontre. Le premier set était tendu, j’étais un peu stressé et j’avais moins de réussite. Le deuxième set a été meilleur. Cette médaille, c’est la récompense de beaucoup de sacrifices et de travail à l’entraînement, donc je suis content ». Ses parents avaient fait le déplacement pour l'encourager. « C'était un super moment à vivre, indique sa mère. Lucas savait qu'il était attendu et il a répondu présent ». Pour son coach en équipe de France, ce sacre n'est pas synonyme de consécration. « C'est juste un début de travail », relativise Sandrine Bernard. Cette dernière, qui entraîne Lucas depuis un an et demi, est d'ores et déjà focalisée sur les Jeux paralympiques 2020 de Tokyo.
Tokyo en ligne de mire
« Nous n'avons aucun autre objectif que de décrocher la médaille d'or au Japon, poursuit-elle._ Après, nous serons tout de même très heureux si Lucas s'empare d'un autre métal. Mais, aujourd'hui, il est numéro 1 mondial, un statut qu'il doit conserver et assumer »_. À encore plus long terme, Sandrine Bernard et son joueur songent aux Jeux paralympiques d’été 2024, qui se dérouleront en France. « Lucas aura alors 26 ans. L'âge idéal pour les Jeux. 2024 pourrait correspondre à l'année de la consécration pour lui, même s'il est en mesure de monter sur la plus haute marche du podium dès 2020 ». D'ici là, d'autres échéances importantes l'attendent. À commencer par les championnats d'Europe à Rodez, au mois d'octobre prochain, puis les Mondiaux en Suisse, l'année suivante.
« J'attends de grandes performances de sa part »
« L'objectif sera de tout remporter, aussi bien en simple qu'en double mixte avec sa partenaire Faustine Noël », annonce l'entraîneur national de parabadminton. Les attentes sont identiques du côté de la direction technique nationale. « J'attends de grandes performances de la part de Lucas. À mon niveau, je ferai tout pour qu'il puisse être médaillé d'or à Tokyo », assure Philippe Limouzin. En parallèle à son activité de sportif de haut niveau, Lucas Mazur poursuit des études en DUT gestion des entreprises et des administrations, à Bourges, avec un emploi du temps aménagé. « Mon fils est quelqu'un de têtu, tient à souligner sa maman. Il ira jusqu'au bout de ce qu'il s'est mis dans la tête... »