La vie n'a pas commencé de la meilleure des façons pour Yannick Ifébé. Opéré d'une hernie à l'âge de trois mois, il se retrouve paraplégique suite à une erreur médicale. « En voulant me soigner, l’anesthésiste n'a pas utilisé le médicament adéquat », se souvient le natif de Longjumeau (Essonne). Toutefois son handicap ne l'empêche pas de pratiquer de nombreux sports. Yannick va notamment s'essayer au basket, à l'athlétisme, à la natation, ou encore au tennis de table. L'année de ses neuf ans, il découvre l'escrime au centre médico-social Lecourbe de la Fondation Saint Jean de Dieu (XVè arrondissement de Paris). « L'entraîneur avait fait une démonstration qui m'avait beaucoup impressionné, indique-t-il. À cette époque, je ne savais même pas qu'il s'agissait d'un sport. Je n'en avais jamais entendu parler. J'aimais beaucoup les films de cape et d'épée ». Le jeune garçon se renseigne alors pour savoir s'il peut pratiquer cette discipline en fauteuil. Quelques années plus tard, il choisit de s'y consacrer pleinement.
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Une moisson de médailles
Les titres vont rapidement s'enchaîner. Après avoir disputé sa première compétition officielle en 2010, Yannick Ifébé devient champion de France à l'épée en individuel deux ans plus tard. L'année 2014 coïncide avec sa première compétition internationale et un titre de vice-champion d'Europe par équipes, au sabre, avec un statut de remplaçant. L'année suivante, le Francilien est sacré champion du monde, en épée par équipes, en compagnie de Romain Noble, de Robert Citerne et d'Alim Latrèche. « C'est mon premier gros titre, juge-t-il. Surtout qu'il s'agissait de mes premiers championnats du monde et que j'étais titulaire. Le coach m'avait laissé ma chance, alors que j'étais en concurrence avec deux autres coéquipiers ». « Il a vraiment su saisir sa chance, confirme Jean-Yves Huet, l'entraîneur de l'équipe de France handisport. Son investissement aux entraînements a fait la différence. Se priver de lui aurait été fou ». La moisson de médailles se poursuit en 2016, avec l'or en individuel à l'épée et l'argent par équipes (avec la même arme) lors des championnats d'Europe. « Avant cette compétition, je n'avais jamais rien gagné en individuel. Ce titre m'a permis de valider ma qualification directement pour les Jeux paralympiques ».
Le Saint Graal à Rio
Et c'est à Rio, au Brésil, que l'athlète handisport va s'emparer du « Saint Graal ». Accompagné de Romain Noble et de Robert Citerne, il monte sur la plus haute marche du podium. « Je sortais d'une grosse déception avec une quatrième place à l'épreuve individuelle, se remémore-t-il. Ce sacre paralympique m'a immédiatement remotivé pour les Jeux de Tokyo 2020. Il correspond à l'aboutissement de tout mon travail ». Effectivement, ce titre lui a permis de franchir un palier important dans sa carrière. « Je le connais depuis qu'il a intégré l'équipe de France. Au début, Yannick était quelqu'un de réservé, plutôt timide, confie Alain Febvre, directeur sportif escrime handisport. Ce statut de champion paralympique l'a amené à aller vers les autres. Depuis, il est beaucoup plus ouvert ». En 2017, l'escrimeur a garni un peu plus son palmarès, avec une médaille de bronze aux championnats du monde, à l’épée. « Ma première médaille aux mondiaux, en individuel », tient-il à souligner.
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Objectif Tokyo 2020
La prochaine grande échéance à venir pour Yannick sera celle des championnats d'Europe, en septembre prochain, à Turin. Suivront les qualifications pour les Jeux paralympiques 2020, qui débuteront avec une Coupe du monde en Géorgie, au mois de novembre. « À Tokyo, il faudrait qu'il décroche une médaille en individuel. Ce serait le minimum », estime son entraîneur. Un titre de champion du monde en 2019 lui validerait directement son billet pour la capitale du Japon. « Ces Jeux sont déjà dans ma tête. J'aspire à monter sur le podium en individuel, confirme le jeune homme. Et à conserver le titre par équipe ». Concernant les Jeux 2024, à Paris, il est encore « un peu tôt » pour y penser. « Pour l'instant, nous n'en parlons pas trop, confesse Jean-Yves Huet. Surtout qu'il mène en parallèle de grandes et belles études ».
Un parcours scolaire exemplaire
Effectivement, le parcours scolaire de Yannick est aussi brillant que sa carrière de sportif de haut niveau. Diplômé d'un Master 2 en droit public à l'université Paris-Descartes en 2015, l'escrimeur a réussi le concours de Sciences Po en février 2017. Comme en matière de sport, il regorge d'ambitions. « J'aimerais devenir diplomate, glisse-t-il. Il faudrait que j'intègre l'ENA (École nationale d'administration) ou que je décroche le concours du ministère des Affaires étrangères ». Des objectifs qui semblent loin d'être insurmontables...